La fortune.


Commandes


Toc, toc, toc, on frappe à ma porte.
S’agit-il d’un malentendu ?
Qui s’invite à cette heure indue
Pour m’importuner de la sorte ?
Serait-ce une œuvre charitable
Venue quêter deux ou trois sous ?
Voilà qui n’est pas à mon goût
Au moment de se mettre à table !

Par la croisée, passant la tête,
Circonspect, je jette un coup d’œil
Et qu’aperçois-je sur le seuil ?
Surgie sans tambour ni trompette,
Dame Fortune est à ma porte,
Que ça m’en coupe l’appétit…
M’interpellant, elle me dit :
« Voyez, voyez ce que j’apporte ! »

Montrant sa corne d’abondance
Regorgeant d’or à profusion,
Me soumet à la tentation,
La laissant bien en évidence,
Sous mon nez avec un sourire…
Moi qui ne suis guère audacieux,
Pas plus que sobre ou vertueux :
C’est fou, je nage en plein délire !

Malgré tout, moi j’ai des principes
Mal placés… Je l’avoue. Tant pis !
Mais j’ai horreur, sans contredit,
Que l’on me dicte ma conduite.
Du coup, sur-le-champ, je rengaine
Tout désir, toute inhibition,
Sans céder à l’invitation,
Je me dispense de l’aubaine !

Pas sûr que de pareils scrupules
Honorent tous les candidats,
Car la Fortune est sur le pas
De ma porte, encore incrédule !
Ah, chers amis, par nos maîtresses,
Nous serons plus gaiement trompés !
Car tous mes voisins attroupés
Implorent ses faveurs traîtresses…


Fin du dernier couplet :
Pierre-Jean de Béranger (1780-1857)



Copyright Jacques Goudeaux - novembre 2018 / Dépôt SACEM 2021




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