Quand je mis le pied Droit dans le bourbier De la noble terre, Je ne savais pas Que, passant le Pas, La vieille Angleterre M’avait réservé Un genre de cuvée Toute britannique, Avec un présent Des plus séduisants Et des plus toniques !
À peine quinze ans Moi pauvre innocent, Je me disais : “Chiche, Une histoire d’amour Mais quoi de mieux pour Apprendre l’english !” Or précisément, Du tempérament, Ces filles des îles En sont tellement Pourvues que vraiment Tout est plus facile.
Juste débarqués, Nous fumes attaqués Par une vraie horde : Ce fut la curée, Un raz de marée, Ô, miséricorde ! Les corsaires d’antan En faisaient autant : Tous à l’abordage ! Et tous en cinq sec De donner du bec Sans marivaudage.
Un peu tête en l’air, Je n’eus pas le flair D’accorder ma lyre. C’est qu’en un instant, C’est qu’en moins de temps Qu’il faut pour le dire, Il n’en restait plus Que le superflu, Le bel héritage ! Car celle qui restait, Fallait la santé, Fallait du courage !
Je crie : “Au secours !” Voilà qu’elle accourt, Me happe au passage. Je voulais sans détours Faire demi-tour, Partir à la nage. Les copains riaient À gorge déployée, Je n’étais pas à noce, Fallait pas compter Sur eux pour m’aider, Ah, les sales rosses !
C’est en fait, je crois, Le chemin de croix Que je devais suivre Et l’air nonchalant, J’allai, tout tremblant, Visiter ses cuivres. Tout énamourée, Elle vint susurrer De douces paroles : Pauvre galérien, Je n’y comprenais rien, Ah, la bonne école !
Étant réputé Qu’à l’heure du thé, C’est l’heure de la pose, Je voulus m’ éclipser Histoire de muser, Renifler les roses Et dans un moment De relâchement, Je me carapate ; Je n’avais pas franchi Le seuil du logis ... Qu’elle me cravate.
Et bien cramponné, Le nez dans le nez, Elle m’enveloppe, Sans plus de baratin Me colle un patin Comme une escalope, Puis, émoustillée, Vient me chatouiller Le bout de l’oreille, Butinant partout, Jusqu’au fond du cou, Pire qu’une abeille.
Alors que le soir Venait, plein d’espoir, Je lui dis : “Ma chère, C’est pas que je m’ennuie Mais il va faire nuit, J’ai des choses à faire ...” N’ayant pas compris Voilà qu’elle me prit La main sans ambages Et l’air malicieux, Me fit des clins d’yeux Gonflant son corsage.
Puis elle me traîna Dans son nirvana Pour compter les astres ; Ne nous leurrons pas, Ne le cachons pas, Ce fut un désastre Si providentiel Qu’au septième ciel ... Je battis de l’aile. Quel drôle de jeu, Je n’y vis que du feu : Trente-six chandelles !
Ô, perfide Albion, Le coeur du vieux lion Rugissait encore : Sa déconvenue Fut sans retenue Et cette pécore Joue la comédie, Joue la tragédie, Se pâme et expire, Couplets anodins Juste dignes d’un Drame de Shakespeare.
Là-bas, Cupidon —Il en a le don— Pique à l’aveuglette, Il peut bien jeter Son arc et tâter Du jeu de fléchettes ... Toutes ces ladies, Moi, je vous le dis, Ne sont pas des tendres ; Sans vous offenser, Messieurs les français, Tirez sans attendre !