Le silence
du soir se peuple de chimères ;
Soudain, minuit s'effare d'être déjà demain, Les
heures en ribambelles se prennent par la main : Je
retrouve en secret l'émotion de naguère.
L'écho des livres clos sur les pupitres nus Fait
sourdre comme un flot de tendresse ingénue, Je
suis heureux parce que j'espère.
Que
me sont les semaines où perce le mystère ?
Par-delà le rideau, l'avenir est subtil ; Que
me font les attentes et ces ardents périls, S'il
me faut libérer ces ardeurs ou les taire ? Au
fil du temps, le doute fait la sourde oreille Et la
passion l'emporte comme le jour s'éveille, Je
suis heureux parce que j'espère.
Je
veux pouvoir lâcher la bride à mes colères Et
larguer les amarres au souffle de ma haine Que
rassasié enfin de mes joies, de mes peines, En un
sursaut d'orgueil, celui de ne pas plaire,
J'aille me réfugier sous des cieux plus sereins Où
connaître le calme en attendant demain, Je
suis heureux parce que j'espère.