RETABLES DES  ÉGLISES DU CANTON DE CHABANAIS


Dans le canton actuel de Chabanais, sept églises ont conservé leurs retables ou des éléments de retables :


Le retable, du latin
retro tabula altaris, est une construction verticale qui porte des décors sculptés et/ou peints et dorés, en arrière de la table d'autel.

Les premiers apparaissent au Moyen Âge, mais c'est aux XVIIe et XVIIIe siècles que les retables prennent de l'importance et sont édifiés dans de nombreuses églises des pays catholiques d'Europe, en particulier en Italie et en Espagne où ils sont souvent monumentaux et très richement décorés.

En France, les retables de cette époque sont très nombreux dans l'Ouest et l'Est, mais on en trouve dans toutes les régions, y compris en Limousin et en Charente limousine qui, jusqu'au Concordat de 1801, appartenait au diocèse de Limoges.

Ce qui explique cette floraison du XVIIe siècle, c'est la volonté de la Papauté, dans le cadre de la Contre-Réforme catholique issue du Concile de Trente, d'introduire la magnificence dans les églises pour attirer les fidèles et les détourner du protestantisme austère dont les temples sont sans décoration.
Il faut y ajouter une sorte de compétition entre les paroisses qui voulaient toutes avoir le plus beau retable !

Mais qui pouvait bien financer ces ouvrages sûrement très coûteux ? Des curés, des confréries, quand elles existaient, et surtout des nobles locaux, dont certains voulaient ainsi faire pardonner les incartades de leurs ancêtres chez les huguenots au XVIe s.

Les retables du XVIIe siècle sont de style baroque, car c'est le style de l'époque, fait de mouvement, de couleurs et parfois d'extravagances et de surcharges. Ceux du XVIIIe siècle sont plus sobres et moins imposants.

Tous sont en bois, sculpté, peint ou doré. Certains sont dotés de tableaux, peints sur toiles ou sur bois, d'autres de statuettes ou de statues. Partout des sculptures de fleurs, de feuilles, de fruits, de pampres.
Leurs scènes peintes ou sculptées sont toutes dédiées à un ou plusieurs saints, ou encore au Christ et à la Vierge Marie.

Ils ont été réalisés par des artisans-artistes remarquables (ébénistes, sculpteurs, peintres, doreurs) qui travaillaient en atelier, mais dont nous ignorons les noms, à l'exception du peintre Laroche qui a signé une toile du retable de Saint-Martin de Pressignac.





L'église Saint-André d'Exideuil



L'église Saint-André d'Exideuil devait avoir un beau retable, mais il n'en reste qu'un panneau, aujourd'hui exposé dans la sacristie. Il représente, en léger relief, saint André, drapé dans un grand    manteau brun-rouge aux étoiles dorées, portant la croix en X sur laquelle il fut crucifié, sur un fond bleu. La colombe dorée du Saint-Esprit surmonte le saint. Deux petits ailerons à feuillage doré encadrent la scène.


Élément du retable de l'église d'Exideuil

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L'église Saint-Pierre-ès-Liens de Chirac



L'église Saint-Pierre-ès-Liens de Chirac ne conserve plus que deux éléments d'un retable qui devait être imposant. Ils ont été placés sur le mur du fond de l'église restaurée au XIXe siècle, alors qu'à l'origine le retable était derrière le maître-autel, contre les fenêtres du triplet de l'abside.
Le plus grand élément se présente comme un grand tableau en bois dont les personnages sont sculptés en « bas-relief ». La scène montre la Délivrance de saint Pierre, libéré de sa prison romaine par un ange.

Éléments du retable de l'église de Chirac

La porte ouverte, le cachot au large dallage et à l'oculus grillagé, les clés sur le sol, les chaînes ou verrous, abandonnées, les deux gardes, casqués, cuirassés et bottés, endormis à côté de leurs épées et lances inutiles, saint Pierre debout, en vêtement bleu et brun, s'appuyant sur le bras de l'ange à l'habit doré éclatant et à l'auréole rayonnante : le miracle de la Délivrance de saint Pierre « ès Liens », patron de l'église de Chirac, est fort bien rendu, avec beaucoup de réalisme.

Un personnage féminin aux bras croisés, symbolisant l'Église (?), en relief doré dans une couronne de fleurs, encadré par deux grandes feuilles d'acanthe vertes, a été aussi sauvegardé.

L'ensemble, daté du XVIIe siècle, a été classé au titre des Monuments historiques en 1941.



L'église Notre-Dame de Grenord


L'église Notre-Dame de Grenord, ancienne paroisse proche de Chabanais, a gardé un charmant petit retable du XVIIIe siècle, qui s'accorde parfaitement avec la rusticité et le caractère modeste de cet édifice.

Encadrant un tabernacle décoré d'une crucifixion, et surmonté de deux ailerons soutenant un Christ triomphant, quatre panneaux sculptés en léger relief et peints en polychromie à dominante rouge, blanche et or, représentent Jésus en prière au mont des Oliviers, la Cène, la Flagellation, le Lavement des pieds. On remarquera le traitement habile, mais naïf et ne respectant pas trop la perspective, de ces petites surfaces où apparaissent cependant de nombreux personnages. Quatre statuettes, assez dégradées, complètent l'ensemble : une sainte, saint Paul et son épée, saint Roch et son chien, saint Pierre (?).
L’œuvre est inscrite à l'inventaire supplémentaire des Monuments historiques depuis 1994.

Le retable de Notre-Dame de Grenord


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L'église Notre-Dame de Chabrac


L'église Notre-Dame de Chabrac, qui vient d'être remarquablement restaurée, possède un magnifique maître-autel du XVIIIe siècle, avec tabernacle et retable en bois doré. Le tabernacle, en forme de grand vase, décoré de l'Agneau mystique, est encadré par deux panneaux portant, en léger relief, des sculptures de tiges de fleurs et de feuilles entrecroisées.
Après restauration par les ateliers de Bruno Tilmant d'Auxy et Anaïs Gailhbaud, l'autel et son retable ont été inscrits à l'inventaire supplémentaire des Monuments historiques, en 2013.

Le maître-autel de l'église Notre-Dame de Chabrac

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L'église Saint-Pierre de Chabanais


L'église Saint-Pierre de Chabanais conserve un ensemble splendide tabernacle-retable, entièrement en bois doré sculpté, du XVIIIe siècle. Restauré en 1993 par les ateliers Karoutzos, il, est classé au titre des Monuments historiques depuis 1980.
Le tabernacle, dont la porte montre l'Agneau mystique, est encadré par les statuettes de saint Pierre et saint Paul. Les quatre évangélistes, reconnaissables à leurs allégories visibles à leurs pieds  (l'aigle de saint Jean, le lion de saint Marc, le taureau de saint Luc et l'ange de saint Matthieu) ,sont aussi représentés par des statuettes, ainsi que deux évêques encadrés par des pots à feu, et un Christ triomphant tout en haut de l'ouvrage.
Quatre très beaux panneaux sculptés en bas-relief montrent saint Pierre, le pêcheur, laissant ses filets pour suivre Jésus, la Délivrance de saint Pierre par un ange, comme à Chirac, Jésus en prière au mont des Oliviers et la Flagellation.
Colonnettes torsadées, petite balustrade, volutes, coquilles, rinceaux, guirlandes de fleurs et de fruits démontrent la virtuosité de l'ébéniste et du sculpteur de cette œuvre d'art.

Le tabernacle-retable de l'église Saint-Pierre de Chabanais


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L'église Saint-Genis de Saulgond


L'église Saint-Genis de Saulgond possède un étonnant retable baroque monumental du XVIIe siècle, ainsi qu'un tabernacle-retable du XVIIIe siècle, tous les deux classés au titre des Monuments historiques depuis 1982, mais qui auraient besoin d'une sérieuse restauration.
Le tabernacle-retable ressemble un peu à celui de Chabrac, avec la porte du tabernacle ornée d'un Christ triomphant encadré par deux panneaux décorés de guirlandes et d'objets stylisés. Le tout en bois doré, sculpté en léger relief.
Le tabernacle-retable de l'église Saint-Genis de Saulgond

Le grand retable baroque qui obscurcit l'intérieur de l'église, car placé contre les fenêtres du triplet du chœur, frappe le visiteur par son ampleur, sa décoration polychrome exubérante, sa mise en scène théâtrale, ses grandes statues, le mystère qui entoure encore certains personnages et certaines scènes peintes.
La scène centrale est facile à identifier : c'est l'Annonciation. L'ange Gabriel annonce à Marie qu'elle sera la mère de Jésus. La tête de Dieu, barbu, deux chérubins et la colombe de l'Esprit Saint, semblent voler au-dessus des deux personnages représentés par des statues presque grandeur nature. L'ensemble se situe dans une sorte de grande alcôve à fond bleu surmontée d'un entablement arrondi portant deux grandes statues d'anges et un immense ostensoir doré rayonnant. C'est l'art baroque, presque rococo, dans toute sa splendeur et sa démesure !
Quatre colonnes torsadées où des angelots nus s'accrochent au pampre qui s'y enroule, soutiennent un entablement denticulé portant des pots à feu. Ces colonnes reposent sur des consoles dont la face avant est sculptée, de manière remarquable, en bas-relief, montrant les quatre évangélistes, en peinture polychrome, reconnaissables, comme à Chabanais, par leurs allégories. De magnifiques guirlandes polychromes de fleurs et de fruits décorent les parties verticales du retable.
Mais le plus intéressant réside dans les deux grandes statues, en ronde-bosse, érigées dans des niches, dont les pieds reposent sur de grosses têtes de chérubins et sous lesquelles se trouvent deux tableaux peints sur bois, malheureusement très abîmés.
Le saint à la barbe noire, en tunique dorée, brandissant une épée (cassée) est saint Paul (et non pas saint Genis comme le nom du saint patron de l'église pourrait le laisser croire). Le tableau en-dessous, très effacé, représente la conversion de saint Paul, renversé de son cheval, sur le chemin de Damas.
La sainte à la tunique dorée, un bras sur sa poitrine et l'autre tenant une palme, est probablement sainte Thècle, disciple de saint Paul. Le tableau sous ses pieds, à peine lisible, doit représenter une scène de la vie de la vierge martyre chrétienne du premier siècle, mais en habits du XVIIe siècle.

Le retable de l'église Saint-Genis de Saulgond


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L'église Saint-Martin de Pressignac


lien vers l'inventaire du patrimoine de la commune de Pressignac > Église Saint-Martin


L'église Saint-Martin de Pressignac possède deux magnifiques retables du XVIIe siècle, classés  au titre des Monuments historiques en 1996, portant quatre grands tableaux peints sur toiles.

Le premier, consacré à saint Martin, placé désormais dans la chapelle nord, n'a pas toujours été à cet emplacement, car, à l'origine, il se trouvait derrière le maître-autel, contre les fenêtres du triplet de l'abside, ce qui obscurcissait considérablement l'église (comme encore aujourd'hui à Saulgond).
C'est à la suite de sa restauration par les ateliers Karoutzos et ceux de Bruno Tilmant d'Auxy, en 1987-88 et 1991-92, qu'il a été placé ici et doté d'un faux autel. La restauration a fait apparaître la signature du peintre de la toile centrale, ainsi que la date du retable : « Laroche pinxit 1676 » (Laroche a peint ce tableau en 1676). Nos recherches nous ont fait découvrir qu'un « Laroche » avait peint un tableau, à peu près à la même date, pour l'église de Baron, dans l'Oise, mais il ne semble pas que ce soit le même qui ait réalisé les deux toiles, car les styles sont un peu différents.

Le retable proprement dit, dont les couleurs dominantes sont le vert, le beige et l'or, présente deux belles colonnes torsadées autour desquelles un pampre doré s'enroule et grimpe jusqu'aux chapiteaux corinthiens qui soutiennent un entablement denticulé, lui aussi doré. Au-dessus, deux pots à feu, d'où sortent des flammes rouges, sont soutenus par des cornes d'abondance renversées. Un décor de feuillages et de fruits ( pommes, poires, raisins), de rosaces et de guirlandes florales entourent les trois tableaux dont les encadrements sont faits de feuilles de laurier d'or.
Les trois toiles se lisent de droite à gauche, et montrent trois épisodes de la vie et de la légende de saint Martin. La première illustre le célèbre épisode du partage du manteau : saint Martin, en soldat romain, partage, du haut de son cheval, son manteau avec un pauvre hère à moitié nu et infirme. La toile centrale montre saint Martin, devenu évêque de Tours, en prière devant un crucifix, revêtu de la célèbre chape rouge rappelant le manteau partagé. Sur la troisième toile, on voit des pèlerins en prière autour du tombeau de saint Martin, à Tours, ainsi qu'une femme espérant la guérison miraculeuse de son enfant.

Retable de Saint-Martin dans l'église de Pressignac

Le second retable, tout aussi beau et intéressant, est situé dans la chapelle gothique sud. Il a été restauré en 1995 par les ateliers Karoutzos.
Plus petit que celui de saint Martin, non daté, mais de la même époque et peut-être du même atelier, il montre deux belles colonnes torsadées, recouvertes d'un pampre doré en fort relief, mais elles sont rectilignes et cannelées à la base. Chapiteaux corinthiens, entablement denticulé, et sur chaque côté, deux splendides ailerons avec une grande volute en bas ornée de feuilles d'acanthe dorées et une petite en haut montrant des fleurs de pivoines, dorées elles aussi. Deux grandes guirlandes verticales encadrent le tableau : elles sont faites de pommes et de fleurs, roses et marguerites. Le tout dans des teintes beige, brun, rose et or.
Quant au tableau, il représente la « Donation » ou don du Rosaire par la Vierge Marie et l'Enfant Jésus à saint Dominique et à sainte Catherine de Sienne. La Vierge, assise sur une nuée et entourée de chérubins, transmet le grand chapelet du Rosaire à saint Dominique, debout en bas à gauche, en habit de dominicain noir et blanc. L'Enfant Jésus que la Vierge tient au bras avec un fort déhanchement, transmet le Rosaire à sainte Catherine de Sienne, en habit de dominicaine, la couronne d'épines sur la tête, un grand lys blanc à la main gauche. Un petit chien porteur d'une torche dans sa gueule, devant un globe terrestre, est une allusion à la légende selon laquelle la mère de saint Dominique, pendant sa grossesse, aurait eu cette vision lui annonçant que son fils serait le chien du Seigneur (en latin Domini canis, d'où Dominique) et qu'il porterait la flamme de la charité à travers le monde.

Le retable de la Donation du Rosaire dans l'église de Pressignac


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copyright © André Berland - février 2014

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