Don Juan

 
Commandes

Au sortir de ma tanière
L’œillet à la boutonnière
Je vais chiner fureter
Butiner et voleter
Au cœur de toutes les flammes
Au corps de toutes les femmes
Fureter de cœur en cœur
Butiner de fleur en fleur
Malgré leurs airs de Madone
Il suffit que l’on se donne
La peine de les cueillir
Pour les voir s’épanouir
Cependant parfois c’est bête
J’en ai par dessus la tête
Pardonnez-moi pourtant je
Suis trop habile à ce jeu

Que j’aille livrer bataille
Eh bien Messieurs je me taille
Humblement la part du lion
N’y voyez pas prétention
Si je n’ai en l’occurrence
Pas trouvé la concurrence
Digne de rivaliser
Y a pas de quoi pavoiser
Et quand je vais à confesse
C’est pour mieux parler de fesse
Avec le curé farceur
Qui raffiné connaisseur
Sait manier la bagatelle
De sa verve spirituelle
En détails ou en action
Et sans la moindre omission

Seulement noblesse oblige
C’est une affaire de prestige
Je prends le haut du panier
Les dames de haute lignée
Femmes d’avocat de notaires
De docteurs de commissaires
Toutes fraîches émoulues
D’un mariage à cœur perdu
Elles m’en donnent en pâture
Et des vertes et des pas mûres
Dieu sait combien j’en apprends
Et sur combien de divans
Ça vous me la baillez belle
Sur untel ou unetelle
Au pays des rabat-joie
L’adultère fait la loi

Leurs maris les tristes sires
Bien que souffrant le martyre
Sont à peine convaincus
De leur rôle de cocus
Il faut les voir faire face
Corne en avant tête basse
Se gardant tant bien que mal
Du coup qu’ils prennent au moral
Si je joue au trou-madame
Ils me traiteront d’infâme
Ces fantoches refoulés
Au désir exacerbé
Mais cramoisis d’impuissance
Que la féminine engeance
Me concède ses faveurs
Ils en crèveront d’aigreur

Mais surtout n’allez pas croire
Que je fasse un purgatoire
De rombières de quartier
En jouant les flibustiers
Va pour ses premières armes
Non je dispense mes charmes
Sans aucune retenue
Sur les belles ingénues
Mais celle-là qui résiste
Qui se cabre qui persiste
Si je ne peux sans façon
Lui faire entendre raison
J’emploie tous les stratagèmes
La menace d’anathème
Je verse dans le blason
Me répands en pâmoison

Que j’aille décrocher la lune
Ô revers de la fortune
Et que ce soit pour des clous
De bon coeur je m’y résous
Avec tambour et trompettes
Je ravale mes sornettes
Je lui rends tous les honneurs
Et lui fait porter des fleurs
Quand mon heure fatidique
Sonnera toute la clique
Celle des cornards branchus
Des rapaces au bec crochu
Impatients que je succombe
Pour aller souiller ma tombe
Dans un infernal sabbat
Fera la sainte nouba

À courir à perdre haleine
À courir la prétentaine
En sombrant dans le déduit
Il arrive qu’on essuie
Des déconvenues certaines
Il n’en faut pas porter peine
Honte soit du passionné
Je lui fais un pied-de-nez
Quant à vous tas de bougresses
Qui protégez bien vos fesses
Grenouilles de bénitier
Qui coassez volontiers
Et au nom de la morale
Gazouillez des amygdales
Qui n’avez rien de Psyché
Allez vous faire embrocher

Au sortir de ma tanière
L’œillet à la boutonnière
Je vais chiner fureter
Butiner et voleter
Au cœur de toutes les flammes
Au corps de toutes les femmes
Fureter de cœur en cœur
Butiner de fleur en fleur


Copyright © Jacques Goudeaux - avril 1985 / Dépôt légal SACEM 1985



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